lundi 20 juin 2011

Le CESER Bretagne inquiet pour la gouvernance de la mer et du littoral


Dans sa session du 16 juin dernier, le Conseil économique, social et environnemental régional de Bretagne (CESER) vient de voter un vœu, à l’unanimité relatif à la formalisation d’une politique nationale pour la mer et le littoral et ses conséquences pour la Bretagne. Il s'inquiète des conséquences pour la Bretagne des décrets relatifs au plan d'action pour le milieu marin et à la stratégie nationale pour la mer et le littoral

Le CESER rappelle ainsi que le décret traduisant en droit français la directive cadre « Stratégie pour le milieu marin » (décret n°2011-492 du 5 mai 2011) relatif au plan d’action pour le milieu marin prévoit l’élaboration et la mise en œuvre, à l’échelle de sous-régions marines, de plans d’action pour le milieu marin comprenant :
- une évaluation initiale de l’état écologique des eaux marines ; - la définition du bon état écologique pour ces eaux ; - des objectifs environnementaux en vue de parvenir au bon état écologique ; - un programme de surveillance ; - un programme de mesures fondées sur l’évaluation initiale, destiné à réaliser et maintenir un bon état écologique du milieu marin ou à conserver celui-ci.

Au regard de cette politique - où l’élaboration et la mise en œuvre des plans d’action pour le milieu marin relèvent de la compétence de Préfets coordonnateurs (le Préfet de la région Bretagne ne disposera pas de la responsabilité de Préfet coordonnateur) la Bretagne est concernée par trois sous-régions marines définies dans ce décret :
- la Bretagne Nord, jusqu’à la Pointe du Raz, est intégrée dans la sous-région Manche
Mer du Nord (sous la responsabilité du Préfet maritime de la Manche Mer du Nord et du Préfet de la région Haute-Normandie) ;
- la Bretagne Sud est intégrée dans la sous-région Golfe de Gascogne (sous la responsabilité du Préfet maritime de l’Atlantique et du Préfet de la région Pays de la Loire) ;
- les eaux de la mer d’Iroise sont intégrées dans la sous-région des Mers celtiques (responsabilité du Préfet maritime de l’Atlantique et du Préfet de la région Pays de la Loire).

Le CESER Bretagne rappelle que « ce décret prévoit que les collectivités territoriales, les chambres consulaires, les agences régionales de santé, les comités des pêches maritimes et des élevages marins, les comités régionaux de la conchyliculture et les associations de protection de l’environnement ne seront consultés, pour avis, que quelques mois avant l’achèvement des plans d’action, leur élaboration étant confiée uniquement aux représentants de l’Etat et à leurs services. »

Le cadre réglementaire tel qu’il est défini prévoit également qu’à cette organisation en trois sous-régions viendront se superposer un découpage et une gouvernance par façades maritimes, proposés lors du Grenelle de la mer et repris dans la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, comme échelons de mise en œuvre de la Stratégie nationale pour la mer et le littoral.

Un second décret - en cours d’élaboration - définira le format de ces façades et la gouvernance qui sera mise en œuvre pour élaborer les documents stratégiques de façade. « Ces façades maritimes devraient s’appuyer, non pas sur les sous-régions marines (décrites ci-dessus) , ce qui aurait traduit une certaine cohérence, mais sur les contours des Directions interrégionales de la mer (DIRM), à savoir :
- une façade Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Haute-Normandie et Basse-Normandie, calquée sur la DIRM Manche Est Mer du Nord dont le siège est au Havre ;
- une façade Bretagne et Pays de la Loire, calquée sur la DIRM Nord Atlantique Manche Ouest, dont le siège est à Nantes ;

- une façade Poitou-Charentes et Aquitaine, calquée sur la DIRM Sud Atlantique, dont le siège est à Bordeaux. »


le CESER de Bretagne dans la présentation du vœu qu’il vient de voter indique s'agissant des enjeux d’une politique maritime intégrée pour la Bretagne, que "dans ses rapports, avis et vœux, notamment sur la gestion concertée du littoral et la politique maritime intégrée (2004 et 2007), le CESER a toujours insisté sur la nécessité d’engager des démarches partagées, avec différentes modalités de concertation assurant une meilleure participation de l’ensemble des acteurs concernés par la gestion de la zone côtière, Etat, collectivités et acteurs socioprofessionnels. Il a également insisté sur la mise en réseau des acteurs, et notamment des porteurs de projets, qui permet de mutualiser les compétences et de s’enrichir des expériences des autres. Il a ainsi rappelé à plusieurs reprises l’importance de reconnaître et de s’appuyer sur l’existant.

La charte des espaces côtiers bretons, adoptée en 2007, répondait à ces préconisations émises par le CESER. Elle avait d’ailleurs été lauréate de l’appel à projets lancé par la DATAR pour la gestion intégrée des zones côtières, et soulignée à cette occasion comme pouvant préfigurer le rôle de l’échelon régional dans la mise en œuvre d’une gestion intégrée des zones côtières. Le CESER avait par la suite souligné l’exemplarité de cette démarche. Dans son analyse des conditions de succès du déploiement des énergies marines en Bretagne (2009), le CESER avait par ailleurs appelé de ses vœux que la Conférence régionale de la mer et du littoral, prévue dans la charte des espaces côtiers bretons et installée en 2009, se saisisse du sujet, afin d’initier une convergence entre Etat et Conseil régional sur cette question importante pour la Bretagne."

Le CESER se félicite d'ailleurs que cette instance - co-présidée par le Préfet maritime de l’Atlantique, le Préfet de la région Bretagne et le Président du Conseil régional de Bretagne - ait rempli son rôle en définissant, en concertation avec les acteurs concernés et dans le respect des compétences de chacun, les zones possibles pour l’implantation de l’éolien offshore posé (pour en savoir plus sur les énergies marines consultez le blog des énergies de la mer)

Il poursuit en précisant que "la disparition de la Direction régionale des affaires maritimes, la localisation de la DIRM à Nantes, ainsi que les menaces récurrentes qui pèsent sur l’enseignement maritime en Bretagne, constituent des signes inquiétants d’une sous-estimation du poids et des enjeux maritimes de la Bretagne, très préjudiciables à la réalisation de ses ambitions.
Mais avec ces deux décrets, au nom d’une nouvelle stratégie nationale pour la mer et le littoral et d’une «gouvernance renouvelée » qu’avait appelée de ses vœux le Comité interministériel de la mer de décembre 2009, ce sont tous les dispositifs existants à l’échelle locale et régionale, les engagements et les projets des acteurs des territoires, et la gouvernance patiemment construite au cours du temps qui se voient remis en question."


Le Vœu du CESER de Bretagne pour une gouvernance renouvelée de la mer et du littoral :

« Tout en appuyant fortement la nécessité de parvenir à un bon état écologique des eaux marines et côtières, et en prenant acte du découpage imposé par la directive cadre « Stratégie pour le milieu marin », le Conseil économique, social et environnemental régional de Bretagne s’inquiète des conséquences des deux décrets mentionnés plus haut sur la cohérence, l’opérationnalité et l’efficacité de la politique maritime nationale et de sa déclinaison en Bretagne, mais aussi des conséquences sur les nombreuses initiatives relatives à la mer et au littoral prises en Bretagne, à différents niveaux et par différents acteurs, depuis de nombreuses années.

Ainsi, s’il partage les objectifs à atteindre, il s’inquiète fortement des options organisationnelles retenues et des moyens et méthodes proposés pour les atteindre, qui relèguent au statut de « spectateurs » ceux qui étaient « acteurs » et vont à l’encontre même du principe de politique maritime intégrée.

Le CESER appuie l’idée de pouvoir expérimenter et innover, proposition qui concluait sa contribution de juin 2007 "Pour une politique maritime en Bretagne ». C’est pourquoi il s’associe pleinement au souhait du Conseil régional de pouvoir expérimenter, en Bretagne, une gouvernance renouvelée de la mer et du littoral, en faisant évoluer la Conférence régionale de la mer et du littoral, instance associant Etat, Région et acteurs des territoires, vers une instance opérationnelle chargée de la déclinaison et de la mise en œuvre des objectifs nationaux, en cohérence avec les projets menés à l’échelle locale et à l’échelle des façades maritimes, pour peu que celles-ci soient elles-mêmes définies en cohérence avec les sous-régions marines.
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Article RH 3B Conseils
Sources : CESER Bretagne